Tilly Norwood, actrice IA sans passé, sans chair et sans salaire, réactions

10 octobre 2025
Télécharger le podcast

Dans un contexte déjà tendu sur les droits à l’image et la place des artistes, la création de Tilly Norwood a fait l’effet d’une bombe. Pour La Radio du Cinéma, Félix Balmonet, cofondateur de Chat3D, réagit à cette affaire en posant un cadre éthique fort : « L’IA ne doit pas remplacer les artistes, mais les servir ».

Une actrice sans corps, mais avec du buzz

Depuis la révélation de l’existence de Tilly Norwood, star virtuelle développée par Eline Van der Velden, la presse internationale s’emballe. The Guardian, The Hollywood Reporter, ou encore Le Monde décrivent un phénomène troublant : l’IA serait capable de générer une comédienne complète, avec voix, gestuelle et expressivité, inspirée de performances humaines… sans leur consentement.

« C’est la suite logique des avatars 3D développés dans la mode ou les réseaux sociaux. Mais là, c’est un franchissement de seuil », analyse Félix Balmonet. À la tête de Chat3D, une entreprise française spécialisée dans les outils IA pour la création 3D, il voit dans l’affaire Norwood un tournant préoccupant pour la création artistique.

Éthique ou efficacité : deux visions de l’IA

« Aujourd’hui, il y a deux écoles », poursuit Félix Balmonet.. « Ceux qui veulent remplacer les humains, et ceux qui veulent les outiller. Nous, on est dans la seconde catégorie. 

Car contrairement aux studios à l’origine de Tilly Norwood, qui visent jusqu’à 90% de réduction de coûts en supprimant les cachets et les équipes, Chat3D intègre l’IA comme un compagnon créatif : « Nos outils s’intègrent dans les logiciels existants. C’est toujours l’artiste qui pilote. »

Des données opaques et des frontières brouillées

Le problème, selon lui, dépasse la question de l’emploi : « On ne sait même pas sur quoi l’IA de Tilly Norwood a été entraînée. Il y a une opacité totale. » Des soupçons pèsent sur l’utilisation non autorisée de vidéos d’acteurs réels pour nourrir les algorithmes. « Le respect du droit à l’image, du droit d’auteur, est mis à mal, notamment par certaines entreprises asiatiques très avancées sur le plan technologique. »

Renouveau ou danger ?

Le débat divise même les plus grands : George Miller voit l’IA comme une nouvelle Renaissance pour le cinéma, tandis que Emily Blunt s’inquiète publiquement de son usage excessif. Pour Félix Balmonet., la vérité est plus nuancée : « L’IA peut être un outil de liberté créative. Mais utilisée pour remplacer l’humain, elle devient problématique. »

Et de rappeler que des avancées similaires – comme la motion capture ou les VFX – avaient elles aussi suscité la crainte, avant de créer de nouveaux métiers. « Encore faut-il qu’on choisisse d’en faire un outil, pas une fin en soi. »

Chat3D : refuser de créer une « autre Tilly »

Lorsqu’on lui demande s’il accepterait de créer une nouvelle actrice IA pour une plateforme, la réponse est sans appel : « Ce n’est pas notre mission. On nous l’a déjà demandé, notamment en Asie, mais on a toujours refusé. » Une ligne rouge claire, mais jusqu'à quand ?

Des conseils lucides aux créateurs de demain

En contact régulier avec les écoles de création numérique, Félix Balmonet observe une inquiétude croissante chez les étudiants : « Beaucoup pensent que l’IA va les remplacer. Mais c’est faux. L’IA ne remplace pas un artiste : elle augmente un artiste qui sait l’utiliser. »

Un message qu’il martèle : l’avenir appartient à ceux qui embrassent la technologie avec discernement. Pourtant « Certains investisseurs refusent de financer des studios qui tournent le dos à l’IA. »

Vers un futur post-humain ? Pas si vite

Alors que des outils comme Sora (développé par OpenAI) permettent déjà de générer des vidéos ultra-réalistes, la frontière entre réel et synthétique s’efface de plus en plus. Mais même les meilleures IA nécessitent encore du post-traitement : « Les productions les plus réussies passent toujours par des mains humaines pour finaliser les images. »

Un sursis ? Peut-être. Une opportunité ? Certainement, pour qui saura garder la main sur le récit.

Spécialisée dans l’intégration d’intelligence artificielle dans les pipelines de création 3D, Chat3D entreprise française, conçoit des solutions pensées pour accélérer la production tout en laissant la main aux créateurs. Destinée aux studios d’animation, aux développeurs de jeux vidéo ou aux professionnels des effets visuels, la plateforme propose des modules adaptables aux logiciels existants. Chat3D se distingue par une approche centrée sur l’utilisateur professionnel, avec des outils pensés pour optimiser les étapes répétitives sans automatiser le geste créatif. Plus d'infos : https://chat3d.ai